Pays Baltes

Estonie, Lettonie et Lituanie

M. JEAN-PIERRE JOUYET: le déplacement en Lituanie

par | 6/09/2007

Nous voulons renforcer nos relations avec la Lituanie, mais également, de façon plus générale, avec les pays de la Baltique. Nous allons réfléchir avec la Lituanie à des axes de travail pour l’avenir, sur des sujets pour lesquels nous avons des intérêts communs, et ils sont potentiellement nombreux.

DEPLACEMENT EN LITUANIE

ENTRETIEN DU SECRETAIRE D’ETAT CHARGE DES AFFAIRES EUROPEENNES, M. JEAN-PIERRE JOUYET,
AVEC LE QUOTIDIEN LITUANIEN « LIETUVOS ZINIOS »

Q – Monsieur le Ministre, quels problèmes allez-vous aborder en Lituanie et avec qui ? Dans quels domaines la France aurait-elle besoin du soutien de la Lituanie pour résoudre les problèmes de l’Union européenne ?

R – Lors de ce déplacement en Lituanie, je rencontrerai notamment le président de la République, le Premier ministre, le ministre ou le vice-ministre de l’Economie, le président du Parlement, le président et le vice-président de la Commission des Affaires européennes, et le sous-secrétaire d’Etat au ministère des Affaires étrangères.

Participer à l’Union européenne rend nécessaire un dialogue nourri avec nos partenaires afin de concrétiser et faire vivre la solidarité entre tous les Etats membres, proclamée par les Traités. Nous voulons renforcer nos relations avec la Lituanie, mais également, de façon plus générale, avec les pays de la Baltique. Nous allons réfléchir avec la Lituanie à des axes de travail pour l’avenir, sur des sujets pour lesquels nous avons des intérêts communs, et ils sont potentiellement nombreux. Je citerai ainsi la définition d’une politique énergétique ambitieuse pour l’Union européenne et la promotion d’une interconnexion électrique, la finalisation du nouveau Traité institutionnel, l’élargissement de l’espace Schengen ou le développement d’une stratégie de développement durable. Je serai également heureux d’échanger avec nos partenaires lituaniens sur les priorités que nous envisageons de porter pendant la Présidence française de l’Union au second semestre 2008. Il s’agit notamment de l’énergie, de l’environnement, de l’immigration et du renforcement de la Politique étrangère de sécurité et de défense.

Enfin, nous allons aborder des questions de coopération bilatérale, en particulier en matière universitaire et scientifique.

Q – Comment les Français comprennent le terme « Europe forte” utilisé par le Président Nicolas Sarkozy ?

R – Il s’agit d’une Europe forte sur les plans diplomatique, économique et militaire : ces trois aspects sont indissociables. Le président Nicolas Sarkozy, dans son discours devant les Ambassadeurs, a souligné que l’Europe était pour la France une priorité absolue. C’est une stratégie qui part d’une idée simple : le rôle de l’Europe dans la mondialisation doit être accru car l’Europe est le cadre le plus efficace pour que nos pays soit forts dans la mondialisation et profitent des opportunités qu’elle offre.

Vous devez donc avoir d’un côté une Europe économiquement forte, offensive, qui affirme son modèle et qui puisse être en mesure de saisir les opportunités de la mondialisation et, de l’autre côté, une Europe mieux organisée pour faire valoir son influence diplomatique sur la scène internationale. Comme vous le savez, c’est le but du Traité simplifié. L’accord qui a été trouvé au Conseil européen de juin dernier, qui fait en sorte que nous ayons une présidence de l’Union européenne plus stable et une représentation diplomatique plus rationalisée, avec un Haut Représentant pour la politique extérieure de l’Union. Enfin, il faut que l’Europe assume ses responsabilités sur la scène mondiale : face à la multiplication des crises dans le monde, l’Europe doit renforcer ses capacités. C’est pourquoi l’Europe de la défense doit encore progresser.

Les Français, manifestement, adhèrent à cette vision et retrouvent confiance dans l’Union européenne. Dans un sondage récent, ils sont 61 % à se déclarer attachés à l’Union européenne, et 72 % à penser que l’Union défend leurs intérêts.

Q – Pensez-vous que les spécialistes français de l’énergie nucléaire pourraient contribuer à la construction du nouveau réacteur de la centrale nucléaire d’Ignalina, car la France est connue comme le pays de l’énergie nucléaire ?

R – La France dispose d’une expertise forte dans le domaine nucléaire, et reconnue comme tel sur le plan international. Elle est l’un des rares pays au monde à maîtriser l’ensemble de la filière nucléaire. Je sais qu’Areva a établi avec la Lituanie, des contacts approfondis sur ces questions de production énergétique. Il va de soi que le gouvernement français suit avec attention les démarches effectuées dans cette perspective. Ceci renforcerait les capacités de l’Union et son indépendance énergétique, et permettrait de capitaliser, en interne, sur les meilleures pratiques en la matière.

Q – Comment la France arrive-t-elle à résoudre les problèmes sociaux après les émeutes dans les banlieues et quand envisage-t-elle d’ouvrir le marché du travail pour les citoyens des nouveaux états membres de l’Union européenne ?

R – La crise qui a touché les banlieues, à l’automne 2005, avait sans doute de multiples causes. J’y ai surtout vu le désarroi de jeunes Français qui ne se sentaient pas citoyens à part entière et revendiquaient cette citoyenneté. Toute une série de mesures ont été engagées pour réconcilier ces jeunes Français avec la République et ses principes.

Pour désenclaver les quartiers, lutter contre les discriminations et améliorer la réussite scolaire, un plan « respect et égalité des chances » est en cours de préparation. Il portera notamment sur la réduction du nombre d’élèves par classe dans les établissements en difficulté et sur la création d’internats de réussite éducative. L’amélioration de la situation des quartiers passe également par une politique ferme en matière de sécurité : c’est l’objet de la récente loi qui a renforcé les sanctions contre les récidivistes.

Enfin, comme l’avait annoncé le président de la République durant sa campagne, la réhabilitation des quartiers est une priorité pour le gouvernement. Un effort massif de l’Etat va être poursuivi en faveur de la rénovation pour répondre à la situation difficile que connaissent nos banlieues. L’objectif est de relancer massivement la construction avec 500 000 nouveaux logements construits par an dont 120 000 logements sociaux.

Quant à moi, je crois à une politique de discrimination positive, dans certains cas. Je soutiens par exemple depuis le début une initiative lancée par une grande école parisienne, l’Institut de d’Etudes politiques, qui chaque année offre des places à certains jeunes issus des banlieues.

Le ministère des Affaires étrangères et européennes a, lui aussi, engagé une action en faveur de l’emploi des jeunes peu qualifiés. Ce dispositif vise à favoriser l’égalité des chances, et à faire jouer un rôle plus actif à la fonction publique en matière de lutte contre les discriminations.

S’agissant de l’accès des ressortissants des nouveaux Etats membres à son marché du travail, la France a fait le choix d’une ouverture progressive et maîtrisée dans le cadre des dispositions prévues par les traités d’adhésion. De manière générale, une autorisation de travail demeure nécessaire pour exercer une activité professionnelle en France. Néanmoins, depuis le 1er mai 2006 pour huit Etats membres, dont la Lituanie, les restrictions à la libre circulation des salariés ont été assouplies pour l’accès à certains secteurs connaissant des difficultés de recrutement en France comme le bâtiment, l’hôtellerie-restauration, le commerce et la vente, la propreté. Pour ces secteurs, l’obtention d’une autorisation de travail passe par une procédure simplifiée. Le prochain rendez-vous fixé par la Commission pour réexaminer ces régimes est fixé au 1er mai 2009. Nous verrons à cette date si les conditions sont réunies pour permettre une ouverture totale de notre marché du travail. En tout état de cause, la libre-circulation des travailleurs sera pleinement mise en œuvre à partir de 2011.

Q – Après les élections, Ankara a déclaré renforcer ses efforts pour entrer dans l’Union européenne mais M. Sarkozy ne cache pas qu’il est seulement pour un partenariat avec la Turquie. Quelle est votre opinion sur l’adhésion de la Turquie à l’Union européenne ?

R – Le président Sarkozy a précisé sans ambiguïté que la France ne s’oppose pas à ce que de nouveaux chapitres de négociation soient ouverts avec la Turquie, à condition que ces chapitres ne mènent pas directement à l’adhésion de la Turquie mais laissent ouverte la possibilité d’une future association entre la Turquie et l’Union européenne. C’est cette solution que nous défendons.

Une trentaine de chapitres, sur les 35 restants, pourraient ainsi être ouverts. Parallèlement, nous souhaitons la création, au niveau européen, d’un Groupe de Sages chargé de réfléchir à cette question : que sera l’Union européenne en 2020-2030 ? Quelles seront ses missions ? Cette réflexion est aujourd’hui nécessaire, pour les citoyens européens, qui ont besoin de savoir dans quoi ils sont engagés, mais aussi pour nous qui avons la responsabilité de mener à bien le projet européen et de construire l’Europe de demain.

Q – Qu’est-ce que la France envisage de faire après que ses citoyens ont rejeté la nouvelle Constitution de l’Union européenne ? Le président a-t-il une solution ?

R – Le président de la République, avant les élections de mai dernier, avait annoncé qu’il relancerait les négociations pour un nouveau Traité, qui devrait ensuite être ratifié par la voie parlementaire, afin que la France puisse de nouveau être présente sur la scène européenne. Cet espoir s’est concrétisé en juin au Conseil européen. Grâce aux efforts de tous les Etats membres, un mandat précis a pu être adopté en vue de la rédaction d’un Traité simplifié. Je tiens à souligner le rôle décisif joué par le président Adamkus dans la recherche du compromis qui a permis d’aboutir à cet accord.

Le nouveau texte, qui n’est plus de nature constitutionnelle, prend en compte les préoccupations exprimées par les Français sur un certain nombre de points importants, en ce qui concerne par exemple les services publics ou le rôle de l’Union dans la protection de ses citoyens. Nous espérons que la Conférence intergouvernementale qui a lieu en ce moment va rapidement donner naissance à ce traité simplifié. Il pourrait être finalisé pour le Conseil européen informel de Lisbonne, à la mi-octobre. Nous engagerons alors un processus de ratification parlementaire, conformément à l’engagement du président de la République.

Q – Monsieur le Ministre, votre dernière publication s’appelle « N’enterrez pas la France »; à qui cet ouvrage est-il tout d’abord destiné ?

R – Cet ouvrage, que j’ai co-écrit avec Philippe Mabille – fin connaisseur de la société et de l’économie françaises -, se veut une contribution au débat récent qui a eu lieu en France sur un éventuel déclin de la France en Europe et dans le monde. Je ne partage pas l’idée selon laquelle la France serait en train de « tomber », de manière inexorable.

Il ne faut pas le nier, il y a, bien sûr, bon nombre de domaines dans lesquels la France est en retard et dans lesquels des réformes s’imposent. Y remédier est le sens de l’action entreprise par le gouvernement depuis les élections de mai et des réflexions qui sont en cours pour renforcer le dynamisme de notre économie et la cohésion de notre société.

Mais la France dispose aussi d’atouts particulièrement importants dans le monde moderne : une population active reconnue comme de très grande qualité, un patrimoine culturel et naturel d’une rare richesse, une action extérieure passant par une diplomatie et des acteurs non gouvernementaux particulièrement présents sur la scène internationale, des entreprises qui sont – dans certains secteurs – des champions européens voire mondiaux.

Ce que nous avons voulu dire, par ce livre, c’est que la France dispose, si elle se donne les moyens de les utiliser, de tous les atouts pour renouer avec le dynamisme qu’elle a pu connaître par le passé.

Ceci passe en particulier par une Europe forte, car je suis convaincu que s’il n’y a pas d’Europe forte sans la France, il n’y a pas de France forte sans Europe. C’est le sens de ce que je souhaite dire à nos amis lituaniens : la prochaine Présidence française de l’Europe sera une présidence au service de cette ambition européenne.

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